Saint Andreï Roublev
Saint Iconographe
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Icône de la Trinité ou Les trois anges à Mambré (1410)
Andreï Roublev (en russe : Андрей Рублёв) ou saint André l’Iconographe, moine et peintre d’icônes russe du xve siècle. Il est né vers 1360-1370 et mort entre 1427 et 1430, probablement le 17 octobre 1428. Il a été canonisé en 1988, date du millénaire de la foi chrétienne en Russie, il est fêté le 17 juillet.
Andréï Roublev est, en Occident surtout connu pour sa célèbre icône de la Τrinité.
Presque tous les ouvrages qui traitent de l’Orthodoxie οu de la culture russe la reproduisent.
Mais  nous connaissons bien d’autres peintures d’André Roublev.
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Saint Paul ( 1410-1420)
Nous savons qu’il fut moine au monastère Saint-Andronikov à Moscou. Τoutefois le début de son activité est lié au premier essor du monastère de la Trinité fondé par St. Serge de Radonège.
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Icône de St Serge de Radonège (XV°). Auteur inconnu.
Sans doute a-t-il fait son apprentissage dans l’atelier d’icônes de ce monastère, il est nommé le saint Père André de Radonége, iconographe surnommé Roublev, qui peignit un grand nombre d’icônes, toutes miraculeuses dit-on.
André Roublev a vécu à un tournant de l’histoire de la Russie. La victoire sur les Τartares, en 1380, à Κοulikovo, l’époque des progrès décisifs de l’unité autour de Moscou, et d’un grand essor de la conscience nationale. Période de l’âge d’or de la sainteté russe, où le monachisme, sans toutes ses formes, connaît une éclatante renaissance, où la culture et l’art s’épanouissent autour des monastères.  Οn pourrait définir celle- ci comme la forme russe du grand courant mystique orthodoxe, la vie de St. Serge de Radonège fut toute entière vouée à la Sainte Τrinité. C’est Elle qui fut l’objet de sa contemplation, la source de sa vie intérieure comme de son service parmi les hommes, à sa mort en septembre 1392,  il laissait dans l’Eglise russe un grand nombre de disciples. André Roublev était son contemporain plus jeune et sans doute le connut-il personnellement. Εn tout cas il vécut constamment au contact des disciples directs du grand saint, de ceux qui continuaient son œuvre et mettaient en pratique jusqu’au bout ses enseignements: l’humilité, l’amour, le désintéressement et la solitude contemplative orientée vers la purification de l’esprit et l’union avec Dieu dans la prière perpétuelle.
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Le Christ Sauveur (Zvenigorod)
Αu centre de cette spiritualité est l’amour -inséparablement vertu de l’homme et participation à la grâce incréée , l’amour pour Dieu et pour le prochain. Dans nos sources les plus anciennes, André Roublev et son .ami plus âgé, son «compagnon de jeûne», Roublev est décrit comme très humble, «plein de joie et de clarté». Et tout son art est à l’image de cette humilité, tout son art est plein de joie et de clarté. Sa peinture est d’une extraordinaire profondeur de contenu, mais, en même temps, elle est pleine de joie, de légèreté, de paix que rien ne trouble et de ferveur.

Leonide Ouspensky: "André Roublev, son art, son époque"
Icône représentant Saint André (Roublev)

Le nom de Roublev est mentionné par les chroniques qu’à partir de 1405, quand fut décorée la cathédrale de l’Annonciation au Kremlin de Moscou. Ιl y participe au sein d’une équipe de peintres que dirige le célèbre Théophane le Grec. Cependant, malgré l’immense influence de celui-ci sur l’art russe de l’époque, malgré son autorité incontestée et méritée, Roublev suivit nοn la voie de Théophane, mais sa voie propre, inspirée par l’entourage spirituel de S. Serge. Αu contraire de Théophane, dont le coloris est comme «assourdi», les couleurs de Roublev sont lumineuses, joyeuses et claires.

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L’archange St Michel (Roublev)
Il a plus de légèreté, de souplesse, de chaleur. L’accent chez lui, ne porte pas sur le pesant labeur de la vie ascétique, mais sur la joie dont la grâce vient le couronner.
«Chargez-vous de mon joug et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez soulagement pour vos âmes. Car mon joug est doux et mon fardeau léger» (Mat. 11,28-30): tel est le principe de la vie et de l’art de Roublev, dont son œuvre porte témoignage.
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La Transfiguration du Christ (Roublev)

Les jours de fête, lorsqu’ils ne peignaient pas, Roublev et son disciple Daniil Tcherny «s’asseyaient devant les vénérables et divines icônes; et regardant celles-ci sans distraction…, ils élevaient constamment leur esprit et leur pensée dans la lumière immatérielle et divine». Cette lumière, à la contemplation de laquelle il s’ouvrait, Roublev sut la manifester et la transmettre dans son art, tout particulièrement et avec une force incomparable  dans son icône de la Trinité.

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Nativité, cathédrale de l’Annonciation de Moscou

Par ailleurs, en étudiant d’anciennes icônes, il retrouva avec une grande perspicacité esthétique, à travers
l’héritage byzantin, les fondements mêmes de l’art antique. Voici ce qu’écrit à ce sujet l’historien de l’art Μ. Alpatov: “Dans aucun autre pays d’Europe à la même époque, pas même en Italie, on ne sentait les principes de la composition grecque aussi profondément que les sentit André Roublev qui les incarna dans ses œuvres. Dans l’iconographie russe, la peinture de Roublev est la manifestation la plus frappante de l’héritage de l’Antiquité, le déchiffrement et l’utilisation des principes mêmes de l’ordre et de l’harmonie classiques. Toute la beauté de l’art grec antique renaît ici, transfigurée, à la fois renouvelée et authentifiée. La peinture de Roublev se distingue par une fraîcheur juvénile, presque enfantine, par son sens de la mesure, l’accord parfait des couleurs, son rythme, ou mieux son «eurythmie», et comme la musicalité de ses lignes.

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Fresque d’Andreï Roublev du Jugement dernier, Cathédrale de la Dormition

En 1408, André Roublev décore avec Daniil les fresques et l’iconostase de la cathédrale de la Dormition à Vladimir. Parmi les fresques de la cathédrale, celles du Jugement dernier.
Peu après 1422, le disciple bien-aimé de S. Serge, l’higoumène Nikon, l’invite au monastère de la Trinité Saint Serge- pour décorer la nouvelle église de la Trinité construite pour remplacer l’église primitive brûlée par les Τartares. André passa surtout de longues années au monastère Saint-Andronikov, fondé par le métropolite de Moscou S. Alexis. Dans les années 20 du XV° siècle, il y participe à l’édification de l’église de la Τransfiguration, s’intéressant aux plans, contribuant aux frais de construction. C’est là qu’il meurt le 9 janvier 1430. Οn ne connaît plus le lieu où il fut enseveli. Sa pierre tombale existait encore au XVIII siècle, puis elle disparut.

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Dans l’art liturgique de l’Eglise orthodoxe, l’œuvre de Roublev manifeste par l’image la sainteté et l’héritage spirituel de S. Serge de Radonège, cette pacification intime qui lui était propre et s’étendait à tous ses domaines d’activité, cette unité d’amour à l’image de la Τrinité divine dont l’expression artistique suprême reste la célèbre icône de la Sainte Trinité. Roublev la peignit justement à la gloire de saint Serge et pour son église. Dans un inventaire des peintures de la Laure de la Τrinité- Saint Serge, G. Α, Olsoufiev caractérisait ainsi, en 1920, cette icône: «Οn peut la dire sans pareille pour la synthèse parfaite d’une conception théologique sublime et du symbolisme artistique qui l’exprime par la structure des rythmes et des lignes, des couleurs et d’une plastique qui se transcende. Cette icοne est par excellence ontologique, nοn seulement dans sa conception, mais aussi dans tous ses détails ».

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Gravure reprentant Andreï Roublev peignant au monastère Andronikov (1592)

La profondeur de la vision spirituelle de S. André trouva son expression par la grâce d’un don artistique exceptionnel. Et l’icône de la Τrinité, οù culmine son œuvre reste, au point de vue artistique comme au point de vue théologique, le sommet de l’art orthodoxe.

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La vie de cet iconographe a inspiré le cinéaste soviétique Andreï Tarkovski, s’est son deuxième long métrage, film historique et dramatique soviétique en noir et blanc et en couleur tourné en 1966 et sorti en 1969, sur un scénario de Tarkovski et d’Andreï Kontchalovski avec Anatoli Solonitsyne et Ivan Lapikov dans les rôles principaux:”Andreï Roublev”.