La 68e Mostra de Venise  pactise avec le diable!

Alexandre Nikolaïevitch Sokourov (Александр Николаевич Сокуров).

Le jury présidé par Darren Aronofsky a récompensé le film du réalisateur russe Alexandre Sokourov:

une interprétation du “Faust” de Goethe, sur fond de corruption du pouvoir.

Il y a des films qui font pleurer, rire, penser, des films qui émeuvent, qui changent la vie pour toujours. Faust est de ceux-là”, a déclaré le président du jury, cinéaste et producteur américain, réalisateur du Cygne noir, en décernant ce prix “à l’unanimité”.

Darren S. Aronofsky, cinéaste et producteur américain
Président du jury 2011 de la 68ème Mostra de Venise.

Déjouant en partie les pronostics, le jury a laissé de côté “Carnage” de Roman Polanski, donné grand favori.

Le cinéphile mois de septembre 2011 a commencé sur les chapeaux de roue. En parallèle du Festival de Deauville, la Mostra de Venise vient de rendre son palmarès. Il avait le choix entre 23 films, une sélection haut de gamme réunissant pointures du cinéma (Polanski, Clooney, Cronenberg, To, Friedkin…) et de jeunes réalisateurs, témoins “d’un cinéma international vivant et en marche”.

Une édition 2011, qui a mis à l’honneur l’œuvre dérangeante d’Alexandre Sokourov, enfin récompensé à sa juste valeur grâce à son film Faust, issu du chef-d’œuvre de Goethe. Un long-métrage qui renoue avec l’essence même du cinéma, mettant en lumière l’importance des décors, des costumes, le jeu des comédiens. Une exploration du côté sombre de l’âme humaine, en tête à tête avec un certain Méphistophélès.

"Faust".

Il reprend l’histoire archétype du face-à-face avec le diable, mais sous forme d’une méditation sur la corruption du pouvoir. Les personnages, en costumes du XIXe siècle, y sont inquiétants et évoluent dans une atmosphère étouffante et nauséabonde de fin du monde, un thème cher à cette 68e Mostra.

Photo du casting de "Faust" lors de la présentation officielle le 8 septembre

Faire du cinéma d’auteur, c’est très difficile de nos jours. Je vous remercie pour la compréhension et la fatigue que cela comporte” (de le regarder), a déclaré le réalisateur, “très heureux de vivre dans le cinéma et dans une Europe où, a-t-il dit, nous pouvons nous comprendre”. Faust est le dernier volet d’une tétralogie sur les dictateurs, le pouvoir et la folie humaine, entamée en 1999 avec un portrait fictionnel d’Adolf Hitler.

" Faust "

Alexandre Nikolaïevitch Sokourov (en russe : Александр Николаевич Сокуров), né le 14 juin 1951 à Podorvikha dans la région d’Irkoutsk, Né dans une famille d’officiers militaires, diplômé d’histoire de l’université de Nijni Novgorod en 1974, il entre l’année suivante au VGIK (Institut central du cinéma de l’URSS) de Moscou où il est l’élève de Tarkovski. La plupart des premiers travaux de Sokourov sont bannis par les autorités soviétiques. Durant cette période, il réalise un grand nombre de documentaires. 1996 avec “Mère et fils” il accède à la reconnaissance internationale. Il réalise trois films sur des personnages historiques : Moloch sur Adolf Hitler, Taurus sur Lénine et Le Soleil sur l’empereur Hirohito. Il est aussi célèbre pour avoir tourné “L’Arche russe” au musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg en un seul plan-séquence de 96 minutes.

Alexandre Sokourov en plein tournage de "Faust".

Le cinéaste, pour la première fois sélectionné cette année à Venise, n’avait jamais obtenu plus qu’un prix de la critique et un prix du meilleur scénario à Cannes. Il avait aussi obtenu un Léopard de bronze et un Léopard d’honneur à Locarno.

La récompense : le lion d'or.

Cette distinction du plus ancien festival du monde n’avait été attribué à un cinéaste russe qu’une seule fois, en 2003, à Andreï Zviaguintsev pour “Le retour.”

Les autres prix 2011.

–  Le “Lion d’argent” de la meilleure mise en scène: au Chinois Shangjun Cai pour “People Mountain People Sea”.

–  Le Prix spécial du jury: pour le film italien “Terraferma”, d’Emanuele Crialese.

–  La Coupe Volpi:  pour la meilleure interprétation masculine  à l’Irlandais Michael Fassbender pour son rôle dans “Shame” (Honte), du Britannique Steve McQueen, qui raconte l’addiction sexuelle d’un célibataire new-yorkais.

–   Le Prix de la meilleure actrice: La Chinoise Deanie Ip  pour sa prestation dans le film “Tao Jie” (Une vie simple) de la réalisatrice de Hong Kong Ann Hui.

–  Le Prix du meilleur scénario revient au film grec “Alpeis” (“Alpes”), de Yorgos Lanthimos.

–  La meilleure contribution technique:  “Hauts de Hurlevent” du Britannique Andrea Arnold, d’après le roman d’Emily Bronte.