VOYAGE DE 4 JOURS A YALTA EN CRIMEE

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La Crimée : quelle région du monde voit son nom aussi souvent évoqué dans l’actualité internationale – et dans l’histoire de ces derniers siècles – tout en étant si mal connue des commentateurs occidentaux, si peu visitée par ceux qui en parlent ?

J’ai eu la chance de retourner en Crimée pour la seconde fois cette année en décembre après avoir été invité une première fois à Sébastopol au mois d’avril dans le cadre du Festival du Cinéma Documentaire, et de pouvoir apporter ainsi un témoignage personnel.

Mon voyage en Crimée a commencé à Simferopol. L’avion a atterri à 20 heures dans un aéroport impressionnant, mis en service fin mars 2018, qui n’a rien à envier à ses équivalents internationaux que je connais, alors que la Crimée ne compte que 2,5 millions d’habitants.

J’ai parcouru la centaine de kilomètres qui séparent Simferopol de Yalta sous de fortes chutes de neige. Mais à environ 15 km avant d’arriver à Yalta, le ciel s’est éclairci. Et soudain cette ville m’est apparue comme une oasis après ce voyage mouvementé.

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En la découvrant à flanc de coteaux, j’ai compris pourquoi on appelait Yalta « la petite Nice » avant la révolution russe, d’autant plus que les enseignes des magasins étaient en français !

Une jeune femme prénommée Anna, m’a accueilli à mon arrivée à l’hôtel. Elle possède ce charme et cette beauté russe indéfinissables, une sorte de luminosité dans le visage que j’appelle « l’âme russe ». Son rôle : organiser le voyage, faire office d’interprète en anglais et être notre guide.

Le lendemain nous sommes partis en formant un groupe de sept journalistes européens, accompagnés de trois jeunes femmes guides-interprètes pour une visite de Yalta. Avec trois étapes majeures dans cette balade touristique.

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Palais-musée de Livadia, construit en 1911 par l’architecte Krasnov, selon les souhaits du Tsar Nicolas II, par l’architecte Krasnov qui a émigré dans les années 20 à Belgrade (Royaume de Yougoslavie) où il a accompli une carrière exceptionnelle en construisant dans le centre historique de magnifiques immeubles et autres palais administratifs qui participent aujourd’hui encore magnifiquement à la beauté de cette ville.

 

Krasnov

Ce superbe palais avait été équipé d’un ascenseur et de l’électricité dès sa construction.

Staline a choisi ce lieu somptueux pour la conférence de Yalta en 1945 avec Roosevelt et Churchill (dans la mémoire collective, selon les historiens, le « partage du monde » y a été organisé).

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Nous avons été reçus par la directrice du musée et avons assisté à une conférence avant de visiter ce palais pendant plus de 2 heures.

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Palais-musée d’Aloupka, construit selon les vœux du Prince Vorontzov en 1851.

 

Palais-musée d’Aloupka, face nord.

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Ce palais insolite arbore une architecture très originale mêlant style anglais gothique tardif (façade nord) et style oriental (façade sud). A l’intérieur, nous avons visité une partie des 150 pièces dont la décoration est très influencée par le style anglais.

 

Palais-musée d’Aloupka, face sud

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Autour de ce palais un parc immense avec des terrasses, des lacs, des fontaines et des escaliers majestueux en harmonie avec la nature environnante. La famille Vorontsov a fait construire ce château à l’anglaise car elle vouait une immense admiration à la famille Tudor et à l’Angleterre.

 

Et c’est dans ce palais que Winston Churchill a tout naturellement logé en 1945 lors de la Conférence de Yalta, la décoration lui étant très certainement familière…

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Maison d’Anton Tchekhov, que nous avons visitée en fin de journée. Cette maison construite en 1896, dans laquelle l’écrivain a passé ses quatre dernières années avec sa sœur et sa mère, est assez extraordinaire, on y découvre le mobilier et la vaisselle d’origine.

Anton Tchekhov (1860-1904)

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Une immense salle a été construite à coté, qui constitue le musée Tchekhov avec des milliers de photos de l’écrivain et un espace où sont organisées des conférences.

Bureau et bibliothèque d’Anton Tchekhov

Le lendemain matin nous avons visité le Palais des Khan (Tvor-Khan) dans la ville de Bakhtchyssaraï, palais érigé au milieu du 16ème siècle, mais reconstruit plusieurs fois au fil des divers évènements vécus par la Crimée.

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Il fut la résidence de tous les Khan de Crimée jusqu’à la fin du 18ème siècle et a donné le nom à la ville de Bakhtchyssaraï, qui signifie en turc et en tatare « le palais dans le jardin » .Il est aujourd’hui un musée consacré à la période du Khanat.

 

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L’après-midi fut consacré au monastère des Cavernes de l’Assomption (monastères du faubourg de Bakhtchyssaraï), l’un des plus anciens monastères de Crimée, fondé à la fin du 8ème siècle par des moines et des laïcs persécutés ayant fui Byzance.

 

 

A la fin du 15ème siècle, le monastère est devenu la résidence du Métropolite du diocèse des Goths, le cœur de l’orthodoxie de Crimée, à proximité de la capitale du Khanat de la Crimée. Les Musulmans respectaient ce monastère.

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Pour conclure sur mes impressions concernant la vocation touristiques de cette région, je dirai que la Crimée dispose d’une grande richesse naturelle avec des paysages qui n’ont rien à envier à la Toscane italienne ou à la Provence française, qu’on y découvre de nombreux sites historiques et… qu’elle est totalement méconnue des occidentaux ! Bref elle m’apparaît comme une région magnifique, qui possède de surcroit une belle infrastructure hôtelière et de très belles plages. Chaque année, environ 5 millions de touristes, en majorité russes ou de l’ex-empire soviétique, visitent la Crimée.

La situation politique actuelle m’a évidemment conduit à interroger de nombreuses personnes que j’ai croisées (employés d’hôtel, de musées, passants…) d’origines tatare ou Criméens à qui je demandais comment ils se considéraient depuis le retour de la Crimée au sein de la Russie. Environ 95% des personnes interrogées me répondaient se sentir Russes ou Russes de Crimée, voire Criméens-Russes. Dans les années 90, ils avaient reçu un passeport ukrainien mais ne comprenaient pas bien pourquoi, tout en se sentant « frères »… Chez les Tatares, les réponses étaient plus mitigées et ils répondaient en majorité « ni Russe, ni Ukrainien », mais « Tatare de Crimée » et quelques-uns rêvaient de revenir à une nation tatare.

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Le lendemain, nous partons à Simferopol pour rencontrer quelques ministres au Palais du gouvernement de Crimée situé dans une immense bâtisse donnant sur une gigantesque place au centre de laquelle trône une statue en bronze de Lénine ( j’avoue que j’aurais préféré y voir une statue de Catherine II).

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A l’intérieur du palais du gouvernement, nous longeons de très longs couloirs et croisons des jeunes hommes et des jeunes femmes qui passent d’un bureau à l’autre en nous saluant avec de larges sourires (et dire qu’en France on entend souvent dire que les Russes ne sourient jamais !). D’ailleurs, en occident, nous avons généralement un préjugé d’austérité quant à l’image de ce genre de bâtiments, alors qu’au contraire, il s’en dégage en les fréquentant une ambiance joyeuse et conviviale… surtout quand nous croisons de jolies femmes en tailleurs ou en robes colorées qui nous saluent, toujours avec de larges sourires.

Nous allons ensuite dans une salle genre salle de cinéma et les journalistes et moi-même sommes installés sur une estrade dans des fauteuils. Chacun de nous est interviewé par la chaîne de TV « Rossia 1 » ; on nous demande au cours d’un enregistrement de 52 minutes de partager nos impressions sur ce voyage en Crimée.

Puis nous repartons à travers de longs couloirs pour rencontrer différents ministres à qui nous posons des questions. Personnellement c’est avec la Ministre de la Culture que je m’entretiens, un échange en toute simplicité dans une ambiance chaleureuse. Nous avons eu toutes les réponses à nos questions.

Nous avons ensuite assisté à une conférence dans une autre salle, un député a fait un exposé sur la situation chiffrée de la Crimée (PIB, PNB, croissance…) et sur les projets de développement. Il faut savoir que la Crimée possède deux gouvernements, chacun avec chambre de députés, ministres, administration : le gouvernement de Crimée et le gouvernement de Sébastopol au statut particulier depuis Catherine II (y compris durant l’époque soviétique, la presse occidentale ne signalant jamais cette originalité).

Mon séjour en Crimée se termine après cette journée passée à Simferopol.

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Dimitri Korniloff raccompagné à l’aéroport par la député Natalia Vinokourova (à droite) et les interprètres-guides.

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Retour à Moscou -devenue « la ville lumière » dans le monde.

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J’atterris la nuit à et je rentre en taxi dans la ville enneigée, avec ses larges avenues où tous les immeubles de toute la ville sont éclairés, la radio diffuse une chanson sur Moscou chantée par la grande chanteuse russe Ksenia Devi, vision féerique qui me plonge au plus profond de ma nostalgie ou de mon âme si j’en ai une.

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Ksenia Devi

 

Je vois mon arrière grand-père le général Constantin Alexandrovitch Korniloff,  dans son habit d’officier du Tsar avec la Croix de Saint Georges autour du cou,

accompagné de ma grand-mère en zibeline, sortant d’une soirée au Savoy et attendant une troïka pour rentrer chez eux et je pleure.

Dimitri Korniloff,  décembre 2018